2017 | France
Destination Atlantique ! Après le succès incontestable de la première ligne à grande vitesse entre Paris et Lyon, l’ouest de la France bénéficie à son tour de l’offre TGV. Toute la façade Atlantique est concernée : le val de Loire aux célèbres châteaux, le littoral, ses plages, ses stations balnéaires de charme, et vers la pointe bretonne, le grand large. Une ligne commune au départ de Paris est inaugurée en 1989, qui se divise rapidement en deux branches pour desservir l’ouest et le sud-ouest de la France. En 2017, les deux sections sont achevées, et Rennes et Bordeaux sont respectivement à une heure vingt-cinq et deux heures de Paris. Dans leur sillage, ces deux destinations offrent une belle ouverture vers la pointe de la Bretagne et la Nouvelle-Aquitaine, jusqu’aux portes de l’Espagne. Exceptionnelles sur le plan technique, social et environnemental, ces deux lignes sont aussi une nouvelle fierté industrielle pour le pays.
Au sein de la capitale française, le quartier Montparnasse a une histoire à part. Durant les Années folles qui succédèrent à la Première Guerre mondiale, de nombreux artistes se sont inspirés de l’atmosphère créative de ce quartier populaire. Des peintres – Picasso, Modigliani, Soutine, Chagall, Dali, Léger, Foujita –, des poètes et des écrivains – Hemingway, Aragon, Breton, Sartre, Henri Miller – ont contribué à l’âge d’or de Montparnasse qui s’acheva avec la crise de 1929. Aujourd’hui, on retrouve dans les petites rues de ce quartier animé le cachet du Paris des artistes. Visible depuis l’autre bout de la ville, la tour Montparnasse, construite dans les années 1960, demeure un monument-phare. De la gare de Paris-Montparnasse partent tous les TGV vers l’ouest et le sud-ouest de la France, ainsi que les trains de banlieue.
Modernisée à l’occasion de la mise en service du TGV Atlantique, la gare a été dotée en 1990 de la porte Océane, immense verrière en arche, en référence aux vagues de l’Atlantique. Cet esprit « océan » se retrouve également dans d’autres gares de l’ouest, comme celle de Massy TGV, au sud-ouest de Paris, dont la marquise de toile symbolise les voiles de l’Atlantique, et le grand hall, le ponton d’un bateau. Massy TGV, située sur la branche commune des deux lignes du Grand Ouest, est stratégique pour le réseau TGV. Elle désengorge la gare Montparnasse et joue le rôle de hub pour les trains arrivant du nord, du sud-est et du sud-ouest de la France.
1989 : une nouvelle date pour la deuxième génération
de TGV qui mettent le cap sur l’Atlantique
à 300 km/h, sur 176 kilomètres d’abord, entre
Paris et Connerré (Le Mans). Car le projet est
ambitieux : il s’agit de desservir l’ouest et le sudouest
de la France par deux lignes. Un tronc
commun les réunit à partir de Paris, puis elles se
séparent pour former un « Y » géant, l’une
s’échappant vers Bordeaux et l’autre, vers
Rennes et la Bretagne.
Les deux sections sont achevées dans leur
totalité le 2 juillet 2017. C’est la première fois
que la France inaugure simultanément deux
lignes à grande vitesse séparées, ajoutant ainsi
500 kilomètres à son réseau ferré. Ces lignes
font gagner une heure au trajet Paris-Bordeaux,
trente-neuf minutes au Paris-Rennes.
Des raccordements entre lignes à grande vitesse et réseau classique permettent aux villes intermédiaires – Tours, Poitiers – de bénéficier du gain de temps.
Peu de temps après avoir quitté la gare de Paris-Montparnasse, le TGV enchaîne une succession de tunnels et de tranchées
couvertes pour traverser la banlieue sud de la capitale et créer une coulée verte en surface. Une fois à l’air libre, il file dans la
campagne, traversant des champs de blé et de betteraves à perte de vue et salué par un important parc d’éoliennes.
Après les plates étendues de la Beauce, grenier à blé du pays, le train s’enfonce dans un tunnel construit spécialement pour
éviter les vignobles du Vouvray, une appellation qui a bâti sa renommée sur ses vins blancs. Trois viaducs lui permettent de
franchir le majestueux fleuve Loire, écrin de fiers châteaux, résidences des rois de France au XVIe siècle : Amboise, Azay-le-
Rideau , Chenonceau, Chambord, pour les plus connus. Bâtis en pierre de tuffeau, ils illuminent les somptueux jardins qui les
entourent.
Le TGV passe à proximité de Tours, ville natale de Balzac, étape de choix sur la route des châteaux. Des talus, des rideaux
d’arbres, des murs anti-bruit… la ligne se fait discrète pour respecter son environnement. Poitiers, la ville aux cent clochers, est
aujourd’hui mieux connue grâce à son parc du Futuroscope, aux attractions high-tech.
La lumière se fait plus vive. C’est déjà le Sud et la Charente, où les églises romanes se comptent par centaines, où le Cognac
vieillit dans des fûts de chêne et où la bande dessinée a son festival international à Angoulême. À vingt kilomètres au nord
de Bordeaux, le TGV enjambe la Dordogne. Les rives de cette impétueuse rivière recèlent un patrimoine unique au monde :
des bastides, des villages, d’orgueilleux châteaux, et la capitale mondiale de la préhistoire, Les Eyzies, à quelques kilomètres
de Lascaux, où l’homme du paléolithique a laissé ses plus belles empreintes. Le TGV traverse la Garonne et entre dans Bordeaux.
À cent trente kilomètres au sud-ouest de Paris, le train laisse sur sa gauche
la ligne à grande vitesse qui part en direction de Bordeaux et poursuit sa
route vers Rennes et la Bretagne. Il contourne Le Mans, première ville de
l’Ouest à avoir accueilli le TGV en provenance de Paris en 1989. Grâce
à cette desserte, Le Mans est devenue bien davantage qu’un circuit automobile
vibrant vingt-quatre heures durant, une fois par an. Elle a vu son
économie transformée. Plus d’une centaine d’entreprises se sont installées
autour de la gare, et beaucoup de Sarthois font quotidiennement l’aller et
retour en TGV pour aller travailler à Paris, tout en profitant d’un immobilier
beaucoup moins cher que dans la capitale.
Le train franchit la Sarthe. Vers le sud part la fameuse « virgule de Sablé »,
une liaison ferroviaire de 4 kilomètres qui permet de raccorder la ligne à
grande vitesse Paris-Rennes à la ligne classique partant vers Nantes. Elle
offre pour la première fois en France une infrastructure rapide avec une
nouvelle génération de trains régionaux roulant à 200 km/h. Le TGV passe
à proximité de la célèbre abbaye bénédictine de Solesmes et franchit le
viaduc du Vicoin. Il arrive en Bretagne, où les collines couvertes de maïs et
de champs de légumes alternent avec les prairies et les chemins creux.
Avant d’entrer en gare de Rennes, le train s’enfonce en partie sous le parc
de la Monnaie, poumon vert de la ville. C’est à Rennes que s’est implanté le
poste de commande à distance de tous les TGV circulant dans l’ouest et le
sud-ouest de la France. Véritable tour de contrôle, il veille entre autres à
l’espacement des trains entre eux.
Respecter l’environnement est devenu un enjeu majeur pour les grands travaux
d’infrastructure. Dans cette optique, les lignes Paris-Bordeaux et Paris-
Rennes ont été conçues de façon à traverser le paysage le plus discrètement
possible. Un challenge qui a nécessité de nombreux ouvrages d’art.
Les terrassements et le déboisement ont été réalisés en fonction des
périodes de reproduction et de nidification des animaux. Des passages et
des aménagements spéciaux ont été construits pour protéger les quelque
deux cent quatre-vingts espèces animales et végétales recensées. Le petit
triton de Basius, batracien rarissime en voie de disparition, a bloqué 5 kilomètres
de chantier de la LGV l’Océane durant… deux mois, le temps de son
implantation sur un autre terrain spécialement adapté à son espèce. Des
histoires comme celle-ci, les deux lignes du Grand Ouest en ont connu
d’autres. En Gironde, c’est une espèce d’ail rose qu’il a fallu protéger ; dans
la Vienne, ce sont six mille moules perlières d’eau douce qui ont été déplacées
avant la construction d’un viaduc. Des compensations environnementales
ont également été mises en place pour maintenir la biodiversité des
lieux : des mares pour les amphibiens, des nichoirs pour les insectes, des
boisements plantés pour abriter les oiseaux, etc.
Pour protéger leur terroir, les vignerons du Vouvray ont eu gain de cause,
exigeant que le TGV passe en souterrain sous leurs précieux cépages.
Mieux ! La voie a été placée sur des semelles caoutchoutées anti-vibrations
pour ne pas faire trembler les caves et perturber le vieillissement de ces
vins séculaires, que certains nomment avec humour TGV (Très Grand
Vouvray).
Mais l’ouvrage d’art le plus emblématique de la ligne est le viaduc qui
enjambe la Dordogne sur plus de 1 300 mètres et dont les fondations s’enfoncent
à 40 mètres de profondeur.
→ Le TGV-Atlantique près des marais salants de Guérande, aux environs de la gare du Croisic, 1991.
Aucun aménagement majeur du paysage ne se fait plus sans un diagnostic archéologique. Les lignes à grande vitesse vers le Grand Ouest n’y ont pas échappé, et les fouilles ont permis de belles découvertes. Une opportunité exceptionnelle pour les archéologues ! C’est ainsi qu’en Mayenne, un site préhistorique a été révélé à partir d’un gisement de silex datant de 40 000 à 50 000 ans avant notre ère. Entre Tours et Bordeaux, des nécropoles du néolithique et de l’âge de bronze ont livré des informations précieuses sur le quotidien des communautés agricoles de l’époque. Silex taillés, objets en métal, en bronze, en fer, outils, armes, parures, monnaies antiques ont été mis au jour sur plusieurs sites. L’ensemble des découvertes a fait l’objet de diverses expositions accessibles au grand public.
→ Paysage du Périgord noir dans la vallée de la Dordogne.
Dans le nord de la Charente est née une initiative heureuse : un « observatoire photographique des paysages du Ruffécois traversés par la LGV ». Avec l’accord du constructeur de la ligne, trente points de vue ont été photographiés avant, pendant et après le chantier. Ces photos, prises à la même saison, à la même heure, témoignent de la reconstitution d’un paysage sous un angle révélant le panorama tel que le voient ses habitants.
Une entreprise privée, Lisea, filiale du groupe Vinci, a été désignée comme gestionnaire de la ligne à grande vitesse Sud Europe Atlantique (SEA) entre Tours et Bordeaux. Lisea a obtenu sa concession pour une durée de cinquante ans, assurant le financement partiel, la construction, l’exploitation et la maintenance de la ligne, en contrepartie de péages acquittés pour chaque passage de train. Pour la LGV Bretagne-Pays de la Loire, la société privée Eiffage Rail Express a assuré la construction de la ligne qu’elle doit entretenir pendant vingt-cinq ans en contrepartie d’un loyer quasi fixe.
→ TGV Euroduplex à quai en gare de Bordeaux-Saint-Jean.
Pour fêter la ligne Atlantique, un nouveau TGV est créé en 1984.
Sa livrée bleu et argent est dessinée par le talentueux designer
Roger Tallon, qui réaménage également son intérieur. C’est un TGV
deuxième génération, plus long – dix voitures au lieu de huit –,
plus performant, plus confortable, plus aérodynamique.
Vingt-huit ans plus tard, il est peu à peu remplacé par un TGV
duplex à deux niveaux. Sa livrée blanche porte une large bande
bleu océan finement rehaussée d’une ligne rouge. Cette rame
roule à 320 km/h et peut être couplée à une autre rame aux
heures de pointe, pour doubler le nombre de passagers transportés.
À l’intérieur, la sensation de confort est visible : des
sièges en cuir et laine – gris et rouge en première classe, gris
et bleu en seconde –, davantage d’espace pour les jambes,
des tablettes en bois, des prises de courant… Le design a été
pensé pour durer dans le temps, l’espace a été optimisé pour
permettre de ranger un bagage sous chaque siège, et des
écrans renseignent en temps réel les voyageurs sur le
parcours… Cette ambiance confortable est encore plus nette
en première classe, où les sièges pivotent pour se placer dans
le sens de la marche et où chaque passager se sent comme
dans un cocon pour lire, travailler ou dormir. La voiture bar, très
design, propose une restauration rapide de qualité. Le service
à bord a été également renforcé. Grâce aux portiques de la
gare Montparnasse qui contrôlent les billets à l’embarquement,
les vérifications systématiques sont allégées et les contrôleurs
plus disponibles pour répondre aux attentes des voyageurs.
En 2017, afin de faire face à la concurrence de l’avion lowcost,
du covoiturage et des autocars à petits prix, le TGV s’accompagne
d’une nouvelle marque d’offre commerciale : inOui. Une
façon d’harmoniser les dénominations de ses offres (inOui, Ouigo,
voitures de location Ouicar). La marque premium inOui se distingue
de sa petite soeur lowcost Ouigo lancée en 2013. Reconnaissable
à ses rames bleu ciel à portes rose fluo, Ouigo est un
succès. Moins de services à bord, une seule classe, un seul
bagage à main, mais des billets à petits prix. Ouigo a séduit les
familles en masse, ainsi qu’une nouvelle population de voyageurs
qui n’auraient jamais pris le TGV sans cette offre commerciale.
Les dénominations de services changent mais pas la
marque TGV, nom historique du train à grande vitesse.
C’est peu dire que Bordeaux a changé en vingt ans. Mondialement connue pour ses grands crus aux appellations prestigieuses telles que Château- Margaux, Château Mouton-Rothschild ou Château Lafite, la ville a mis en valeur sa richesse architecturale grâce à une minutieuse rénovation urbaine. Elle a admirablement renoué avec son fleuve, la Garonne, transformant les quais de la rive gauche en une immense promenade « verte », royaume du piéton, dont l’élégant miroir d’eau est le symbole. Bordeaux cultive l’image d’une métropole très dynamique sur le plan économique, et son attractivité a été renforcée avec la nouvelle ligne à grande vitesse qui la place à deux heures de la capitale. La gare Saint-Jean a fait peau neuve. Toute la mobilité a été repensée.
Sous ses immenses halle et verrière du XIXe siècle, superbement rénovées, se croisent les TGV en partance ou en provenance ou en partance de Paris, de Toulouse ou d’Espagne. Avec l’ouverture de la gare sur sa partie arrière, le centre-ville s’est réconcilié avec le quartier Belcier. Le pont de la Palombe, édifié en 2018, permet aux piétons, vélos et automobiles de franchir les trente voies ferrées. La construction du quartier d’affaires Bordeaux Euratlantique transforme peu à peu les abords de la gare ainsi que les deux villes voisines de Bègles et Floirac.
Chef-lieu de la Bretagne, Rennes est une ville dynamique, jeune et porteuse d’innovations, notamment dans le domaine du numérique. Des milliers d’étudiants animent jour et nuit le coeur de la ville. La gare de Rennes a subi une profonde mutation. Les nombreuses dessertes quotidiennes du TGV Paris-Rennes et l’arrivée d’une seconde ligne de métro en 2020 transformeront la gare en un pôle d’échanges multimodal. Une passerelle récente réunit le nord et le sud, autrefois coupés en deux par un faisceau de voies. Haute de plafond, la gare bénéficie d’un éclairage naturel grâce à une couverture transparente. De grandes « vagues » de verre et d’acier sur la façade de l’entrée principale annoncent la proximité de l’océan. L’aménagement urbain le plus emblématique est celui du nouveau quartier sorti de terre autour de la gare : EuroRennes et son ensemble de bureaux, logements et commerces.
Des trains plus rapides, des dessertes plus fréquentes, le TGV rapproche les
entreprises locales de la capitale et des marchés européens, et le faible temps
de parcours attire les passagers. Bordeaux et Rennes voient se développer le
télétravail, rendu possible grâce à des aménagements de bureaux dans les
gares ou l’implantation de centres d’affaires aux alentours. Les régions
desservies par le TGV comptent capter voyages d’affaires et de loisirs.
La campagne publicitaire humoristique de la région Bretagne, « Passez à
l’ouest », a été lancée à l’occasion de la mise en service du Paris-Rennes,
vantant la qualité de vie et la beauté des paysages bretons. Mais la nouvelle
ligne est indissociable de la modernisation des voies vers Brest et Quimper.
Elle s’intègre dans un projet Bretagne grande vitesse qui, à terme, profitera
tous les territoires de la région, du Mont Saint-Michel à la pointe bretonne. En
ce qui concerne la ligne Paris-Bordeaux-Toulouse, le TGV a vu son trafic augmenter
de 60 % en un an vers cette dernière, désormais à quatre heures de
Paris. Le prolongement de la grande vitesse vers le sud de Bordeaux offre de
belles possibilités vers Bilbao pour les affaires et la culture, Arcachon ou le
Pays basque pour les loisirs.
La construction des deux lignes à grande vitesse a nécessité un vaste plan de recrutement, mobilisé des milliers de personnes et donné un nouvel élan à l’emploi local. Elle a favorisé entre autres l’insertion professionnelle des jeunes sans qualification, celle des travailleurs handicapés et des chômeurs de longue durée. Plusieurs centaines de travailleurs, ainsi mieux qualifiés, ont retrouvé un emploi à la fin des travaux.
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